Ce qu'inspire le rachat d'Ingram Micro à la distribution IT

A l'issue de la transaction, le français Alain Monié reste le CEO d'Ingram Micro. Ce n'est pas le cas de Paul Read, président et COO qui a présenté sa démission suite à l'annonce de rachat. (Crédit D.R)

A l'issue de la transaction, le français Alain Monié reste le CEO d'Ingram Micro. Ce n'est pas le cas de Paul Read, président et COO qui a présenté sa démission suite à l'annonce de rachat. (Crédit D.R)

L'acquisition du géant de la distribution informatique Ingram par le consortium chinois HNA pose de nombreuses questions, pour l'instant sans réponses, qui concernent jusqu'aux plus petits revendeurs informatiques.


Le rachat d'Ingram par le chinois Tianjin Tianhai devrait provoquer de gros changements au sein de la distribution IT mondiale. Annoncée il y a deux semaines, cette opération à 6 milliards de dollars ravit l'acquéreur et sa cible mais inquiète d'autres acteurs du marché. Interrogé par nos confrères d'ARN, Nick Verykios, le CEO du grossiste australien Distribution Central estime que « la vente d'Ingram pose des milliers de questions pour la distribution et les fournisseurs. Par exemple, qui seront les prochains leaders ? » « Il y a aussi des problématiques concernant les éditeurs et les fabricants au regard du commerce en Chine. Cela va aussi poser des questions au niveau politique. Qui sait ce qui va se passer », ajoute-t-il.

Ces propose rappellent que les relations commerciales et les enjeux sécuritaires avec la Chine sont parfois compliqués. En 2013, l'ancien patron de la CIA, Michael Hayden, avait justement critiqué les liens très étroits entre l'état chinois et le fabricant Huawei. L'homme affirmait alors que les équipements fournis par Huawei pouvaient être utilisés pour espionner des entreprises et des administrations aux Etats-Unis ou encore en Europe de l'Ouest. Le congrès américain avait fini par demander l'exclusion du fabricant chinois des contrats publics. Malgré tout, l'équipementier est parvenu à s'imposer comme un concurrent sérieux de Cisco Systems, après avoir devancé Alcatel-Lucent et Nokia-Siemens.

La chine veut réduire ses importations

Les observateurs s'accordent sur le fait que cette acquisition prouve, une nouvelle fois, la volonté des entreprises chinoises d'acquérir des actifs dans les activités informatique des pays occidentaux. Suite à l'annonce du rachat d'Ingram Micro, l'agence Bloomberg écrivait : « Au-delà de l'acquisition, cette opération souligne la détermination de la Chine à se doter d'atouts à l'international dans l'IT pour renforcer ses capacités nationales et remplacer l'importation. Les entreprises chinoises cotées en bourse sont en train de s'offrir la plus grande session de shopping de leur histoire ». Les sociétés chinoises cotées disposeraient à l'heure actuelle de 23,8 milliards de dollars de réserves pour réaliser des acquisitions cette année, selon les informations compilées par l'agence de presse. De fait, cette dernière indique que « après seulement 48 jours écoulées en 2016, elles ont déjà presque atteint le record des 25,6 milliards de dollars qu'elles avaient rassemblé l'an dernier. »

Pour David Dicker, le dirigeant du grossiste australien Dicker Data, « c'est un changement très important du paysage de la distribution qui se prépare. Il sera très intéressant de suivre comment tout cela évolue à l'échelle mondiale d'ici l'année prochaine ». Même son de cloche du côté de Karl Sice, dirigeant de Staples Technology Solutions, qui pense également que cette acquisition pose plus de questions qu'elle n'apporte de réponses. Mais à première vue, il estime que cela pourrait être le signe d'un bénéfice en termes de business, avec un territoire plus grand à couvrir et une amélioration du noyau des capacités logistiques. « Ingram a toujours rêvé d'un marché plus grand et d'aptitudes logistiques plus importantes. C'est ce que leur offre cette opération », estime-t-il. « C'est fascinant d'observer l'évolution du panorama des distributeurs. Pour le moment, nous avons plus de questions en suspens que de réponses. Mais c'est un moment excitant, je n'ai jamais vu l'industrie subir des changements tels que ceux d'aujourd'hui ».

Réduire les coûts de livraison

Il y a plus de réaction sur le front des revendeurs et prestataires de services. Jamie Warner, le dirigeant de la société de maintenance IT eNerds commente à son tour : « la vente d'Ingram à Tianjin Tianhai va générer plus d'opérations logistiques globales d'ampleur, ce qui signifie une réduction des coûts de livraison de produits. Les revendeurs pourront ainsi accroitre leurs marges ». Le dirigeant d'une autre société estime que c'est une « opération fascinante, soulignant à quel point la distribution est sous-évaluée. Cette vente laisse présager des changements majeurs dans la distribution ». Pour l'analyste de Telsyte Rodney Gedda, le rachat d'Ingram par un investisseur chinois n'a rien d'une surprise. « Nous avons déjà observé de grosses sociétés, comme Huawei, qui investissent massivement de l'argent en Occident et deviennent des chainons essentiels de la chaine d'approvisionnement. Ces sociétés chinoises sont très bonnes pour séparer le rendement de la gestion de la chaine logistique ». Il rajoute que ça ne devrait pas énormément perturber la vente indirecte. Si tant est que cela puisse ouvrir de nouvelles voies au marché et « amener des produits chinois sur les marchés où Ingram opère. »

Mettre la main sur un acteur important du cloud

Le cofondateur de Channel Dynamics, Moheb Moses, pense que l'investissement d'Ingram dans le cloud et sa récente acquisition d'Odin (Business Unit de Parallels), permettra à Tianjin Tianhai d'avoir accès à l'une des entreprises les plus importantes dans la distribution cloud et digital. « De quoi exposer Ingram à plus de marques chinoises et sensibiliser le marché américain aux marques chinoises ».

Pour le vétéran de l'industrie IT Philip Cronin, le marché est toujours mûr pour le changement. « Il sera opportun de voir ce que cela signifie en termes de concurrence sur le marché mais aussi pour les clients. Ce que nous pourrions trouver sont des liens forts avec plus des marques chinoises que nous ne connaissons pas encore aujourd'hui. »

 

s'abonner
aux newsletters

suivez-nous

Publicité

Derniers Dossiers

2024, l'année de Windows 11

2024, l'année de Windows 11

Si le parc de PC dans les entreprises françaises fonctionne encore majoritairement sous Windows 10, Microsoft a toutefois fixé la fin de son support le 14 octobre 2025....

Publicité