Des ex-revendeurs API ne se satisfont pas des méthodes de Sage PE
La division petite entreprise de Sage essuie les critiques de quelques uns de ses revendeurs. Ils lui reprochent notamment sa façon de gérer sa communication avec ses partenaires et les problèmes techniques que peuvent rencontrer ses logiciels ainsi que sa volonté de profiter d'évolutions réglementaires pour amener les clients à dépenser plus.
Difficile d'en évaluer la force mais il souffle bel et bien un vent de mécontentement au sein du réseau de distribution de la division Petites Entreprises de Sage (Sage PE). Pour mémoire, cette dernière a été créée par l'éditeur de logiciels de gestion après le rachat de son homologue français Euratec et de ses gammes APISoft, APIBat et APIMécanic en septembre 2008. Depuis beaucoup de choses ont changé si l'on compare la relation que les revendeurs d'Euratec entretenaient avec ce dernier et celles qu'ils ont aujourd'hui avec Sage. Manque de communication, menace sur les marges, lenteur de résolution des problèmes techniques ou encore pratiques limites envers les clients font partie des doléances que trois revendeurs interrogées par Distributique.com, sous réserve de préserver leur anonymat, adressent à Sage PE. « Euratec était une petite structure pour qui il était, par nature, aisé d'entretenir des relations de proximité avec ses revendeurs. Sage est beaucoup plus structuré ce qui présente des avantages mais certains n'y voient que des inconvénients », estime Henry Benamram, le directeur de Sage PE.
Au chapitre de ces inconvénients figure la lourdeur administrative du processus de facturation de Sage que d'aucun juge inadapté aux logiciels issus des gammes API. « Lorsque nous commandions un logiciel chez Euratec, nous recevions une facture comprenant le nom du client, l'application concernées et la date. Sage, lui, nous envoie des boîtes uniquement accompagnées d'un numéro de licence que nous devons ensuite aller saisir sur le web pour connaître le destinataire d'un produit. A la longue, cela devient fastidieux », explique un revendeur. Or, le temps, c'est de l'argent. De fait, si le temps passé à réaliser ces manipulations est acceptable pour des logiciels plus coûteux provenant d'autres gammes de Sage, il l'est beaucoup moins pour ceux du catalogue de Sage PE qui génèrent le plus souvent un panier moyen d'une valeur moindre. « Il est vrai qu'il n'a pas été simple d'intégrer le système d'information d'API dans celui de Sage, reconnaît Henry Benamram. Nous sommes conscients des difficultés rencontrées par nos partenaires sur ce point et c'est pourquoi nous menons un gros projet en interne pour fluidifier et améliorer les process. »
Un changement de grille de remise finalement annulé
Outre l'intégration du système d'information d'Euratec, Sage a également dû faire sienne la politique de rémunération des anciens revendeurs de son homologue. Sur ce point, l'éditeur a d'emblée choisi de ne pas créer de tension en laissant leur grille -officielle- inchangée. Ce qui n'a toutefois pas empêché certains revendeurs de voir baisser la marge que leur accordait Euratec. « Nous avons constaté que certains revendeurs agréées réalisaient moins de chiffre d'affaires que d'autres mais bénéficiaient de meilleurs remises. Il n'y avait aucune logique à cela et nous avons donc appliqué strictement la grille de rémunération à tout le monde. Cela a eu pour effet de faire baisser les marges de certains et de les faire monter pour d'autres», justifie Henry Benamram. Mais voila que cette grille de remise valable pour tous a été récemment remise en cause par l'éditeur après trois ans de status quo. En septembre dernier, il réunissait en effet ses revendeurs pour leur annoncer son intention de la modifier à compter du mois de novembre. Dans les grandes lignes, l'éditeur souhaitait que les ventes de contrats avec mise à jour ne soient plus additionnées à celles de ventes de contrats secs pour le calcul des remises de ses revendeurs. L'optique était ensuite d'affecter des taux de remises plus importants aux ventes de contrats de licences avec mises à jour. « En théorie, un revendeur qui parviendrait à vendre uniquement des logiciels avec des contrats de mise à jour verrait ses marges s'améliorer. En pratique, c'est impossible. Au final, ce système risque de nous faire perdre de la marge », tonne un revendeur.
Ce problème de communication entre l'éditeur et ses partenaires semble récurrent. Il s'est notamment posé lorsque les logiciels commercialisés par sa division petite entreprise ont connu des problèmes techniques. « Des bugs dus à la base Access utilisée par les logiciels de la gamme ont commencé à apparaître à partir de septembre 2009 sous la forme de problèmes de lenteur ou encore de résultats de calculs automatisés complètement erronés, relate un revendeur. Il a fallu attendre décembre 2010 pour Sage reconnaisse que le souci provenait d'un défaut logiciel. » D'après ce partenaire, le problème s'est posé à partir de l'arrivée Windows 2008 serveur et s'est amplifié avec celle de Windows 7 sur les postes de travail. «Le bug était dû à des incompatibilités logiciels entre les nouvelles versions de l'OS de Microsoft et Access. Sa résolution a pris du temps car Microsoft n'assurait plus le support nécessaire. Nous avons fait pression pour qu'il délivre un patch qui sera distribué dans la prochaine version du service pack. Il faut savoir que nous ne sommes pas en droit de distribuer nous-mêmes ce correctif pour accélérer sa mise en oeuvre. Au final, nous payons les pots cassés sans être responsable », explique Henry Benamram.
Faire une fleur aux clients pour facturer plus à long terme...
Faire une fleur aux clients pour facturer plus à long terme
Etant en contact direct avec les entreprises utilisatrices, les revendeurs de Sage PE payent aussi ces pots cassés. Ils s'attendent d'ailleurs à devoir encore subir les foudres de leurs clients prochainement à cause de la façon dont Sage PE a décidé de gérer l'évolution de la DADS-U (déclaration automatisée des données sociales unifiée) vers la 4DS (déclaration dématérialisée des données sociales) qui entrera en vigueur en janvier 2012. Jusqu'à présent, les utilisateurs du logiciel de paye de la gamme standard de Sage PE pouvaient générer un fichier numérique respectant le format de la DADS-U et l'uploader ensuite sur le site de l'administration concernée. Pour la 4DS, cela ne sera plus possible puisque Sage a décidé de ne pas mettre sa gamme standard à jour pour permettre la génération d'un fichier conforme à la nouvelle norme. Aux mieux, ses utilisateurs pourront générer des états sur papier qu'ils devront ensuite ressaisir à la main sur Internet. Autant dire qu'ils sont ainsi fortement incités à passer à la version Evolution du logiciel de paye qui, lui, a été mise à jour pour la 4DS. Mais pour cela, ils vont débourser plus. Normalement, la version Evolution est facturée 990 € à l'achat plus 500 € de mise à jour par an (ou 350 € sans le service de télétransmission) pour ceux qui le souhaitent, contre 390 € à l'achat plus 150 € de frais de mise à jour pour la version standard.
« Nous avons mis en place une offre spéciale qui permet de migrer de la paye standard à sa version évolution pour 199 € seulement. En outre, le contrat de mise à jour souscrit pour la version standard sera basculé gratuitement vers la version évolution jusqu'à son terme », précise Henri Benamram. Après, le client devra donc payer 500 € par an de mise à jour. Un simple calcul permet donc de s'apercevoir que la manoeuvre de Sage PE n'est pas avantageuse pour le client à moyen et long terme. « Sage veut profiter de l'évolution de cette norme pour faire débourser d'avantage d'argent à des clients qui ont pourtant souscrit un contrat de mise à jour », s'offusque un revendeur. « Au-delà, du fichier que nos logiciels vont générer à l'intention de l'administration, nous avons mis en place un système portail déclaratif de télétransmission. Il ne s'agit pas d'une simple mise à jour », argue Henry Benamram.
Reste maintenant à savoir comment les clients eux-mêmes vont accueillir la nouvelle. Il est en tous cas certains que ce sont les revendeurs de la division petites entreprises de Sage qui seront aux premières loges pour recevoir leur critique et tenter de leur faire passer la pilule. Henri Benamram ne sera peut-être plus là pour avoir connaissance des remontées du terrain. A l'heure de mettre la touche finale à cet article, nous avons appris que ce dernier prendra prochainement de nouvelles fonctions chez Sage aux Etats-Unis.
Edition du 08/12/2011, par Fabrice Alessi
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