La centralisation des achats publics et le rôle nouveau de l'Ugap menacent à terme les PME informatiques qui comptent dans leur portefeuille de nombreux clients du secteur public. Nos entreprises sont en danger ! » Erwan Lauriot Prevost, le dirigeant de la société de services nordiste BLM, résume parfaitement le malaise actuel de nombreuses PME informatiques comptant dans leur portefeuille des clients du secteur public. Au coeur du courroux de toutes ces entreprises régionales, une immense inquiétude : à terme, la dépense informatique publique risque de leur échapper en grande partie. En effet, l'État - en l'occurrence le gouvernement - entend réaliser de substantielles économies en centralisant ses achats. Selon les estimations du ministère des Finances, cela se traduirait par une réduction de 10 à 15 % de la facture des achats publics, qui s'élève chaque année à 120 MdE environ. Mais aussi par une réduction significative du nombre de fournisseurs potentiels de taille modeste au profit de structures nationales et internationales. L'appel à la décentralisation des achats informatiques À cela s'ajoutent les nouvelles prérogatives accordées à l'Ugap (lire encadré) depuis la réforme du code des marchés publics au début de l'année. Enfin, dans un contexte de décentralisation et de soutien à l'activité des PME, l'État privilégie une orientation exclusive de chasse aux coûts, sans en mesurer réellement la portée sur son propre écosystème dont de nombreuses entreprises profitent. « Faire des économies d'un côté pour créer du chômage de l'autre est un formidable non-sens », explique Jean-Paul Charié, député UMP du Loiret, qui a conduit une mission parlementaire pour favoriser le développement de la compétitivité des PME grâce au numérique. De plus, observe Michel Louyot, président-directeur général d'Infocentre, à l'origine d'une « Lettre ouverte à nos élus » (lire Distributique n° 420 p. 14) demandant à l'État d'accorder aux administrations locales la possibilité de réaliser davantage d'appels d'offres locaux, « la centralisation des achats informatiques est une aberration car jamais un lot n'est acheté, livré et déployé en une seule fois ». Et d'enfoncer le clou : « Ce n'est pas parce qu'on achète 100 PC à Paris que ça coûtera moins cher à installer dans une administration située en province. C'est assurément la proximité qui peut garantir un meilleur prix. Ce que nous souhaitons, c'est que les lots nationaux soient décomposés en lots régionaux pour donner une chance à tout le monde. » Des initiatives locales encore isolées Sur le terrain, quelques revendeurs ont d'ores et déjà décidé de s'attaquer au problème. Soit en commençant à réfléchir à une diversification de leur clientèle vers les PME, à l'instar de Servia Informatique qui réalise actuellement 80 % de son chiffre d'affaires dans le secteur public, soit en montant une structure ad hoc pour mieux accompagner ces évolutions. « En créant la structure Proxicité, qui regroupe six entreprises aux métiers très différents, explique Erwan Lauriot Prevost, nous comptons nous positionner beaucoup mieux pour répondre aux changements de cycles et d'usages dans les marchés publics, notamment dans le cadre de la décentralisation. » Mais ces exemples sont hélas encore assez isolés. « Ce qui peut nous rassurer, c'est l'expérience négative que de nombreux clients ont connue avec l'Ugap dans le passé », conclut, philosophe, Sitou Gayibor, directeur général de Servia Informatique.
Marchés publics : la colère gronde
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