Interview : Nicolas Jacquey consultant Distribution chez Venice Consulting :Trop de services sont encore gratuits.

Les évènements 2004 : Interview : Nicolas Jacquey consultant Distribution chez Venice Consulting "Trop de services sont encore gratuits " Nicolas Jacquey, consultant Distribution du cabinet de conseil Venice Consulting, commente son étude portant sur les services dans la distribution PME. En exclusivité. Les revendeurs informatiques et télécoms ont-ils réussi leur migration vers les services ? À cette question, la société de conseil Venice Consulting répond par l'affirmative. Mais elle s'empresse d'amender cette assertion en précisant que, si prestations il y a, encore beaucoup trop de services sont délivrés gratuitement. Dans une étude conduite auprès de 48 revendeurs informatiques et télécoms ciblant les PME (lire Méthodologie), Venice Consulting révèle également que les revendeurs ont conscience des nombreux freins internes qui les empêchent de valoriser et de développer leur activité de services. Pour Nicolas Jacquey, son auteur, il est également nécessaire de revoir la relation traditionnelle entre revendeur et fournisseurs de référence. Distributique : On reproche souvent à la distribution de ne pas avoir de culture « services ». Ce postulat est-il encore valable aujourd'hui ? Nicolas Jacquey Je mettrais un bémol à cette idée. Les revendeurs possèdent une réelle culture du service. Le réseau de proximité, celui qui adresse les PME, bénéficie d'un bon niveau de confiance de la part de ses clients. Certes, ces revendeurs ne proposent pas de grands services à valeur ajoutée, comme l'audit, la délégation de personnel, etc. Mais ils assurent un véritable service de proximité. Le vrai problème, c'est qu'ils ne le facturent que peu ou pas. Selon moi, ces services gratuits touchent la périphérie de la vente de matériel et sont utilisés comme arme commerciale. Or ce sont autant de points de marge qui s'envolent. Autre difficulté : comme il ne s'agit pas de services facturés, telle la formation, les prestations ne sont pas à la hauteur. D'où une certaine insatisfaction du client. Il faut faire très attention à ces risques... D. Les revendeurs ont-ils à présent pris conscience qu'il leur fallait investir pour valoriser leur offre de services ? N.J. On peut répondre oui, aujourd'hui. Longtemps, on a considéré que chacun pouvait faire du service simplement en le décrétant. Or c'est faux. Pour offrir vraiment du service, il est indispensable de s'inscrire dans le long terme, de renforcer sa base de données clients, de définir de nouvelles procédures, d'embaucher des collaborateurs possédant une forte culture services... Actuellement, beaucoup de revendeurs alimentent 95 % de leur chiffre d'affaires avec leur activité de distribution et y mettent presque toute leur énergie. Or on ne peut envisager de valoriser son offre et de faire évoluer son métier vers plus de services si l'on n'y consacre pas davantage de temps et d'énergie. Cette analyse vaut aussi pour les grands acteurs. À grand renfort de communication ou en rachetant de petites structures de 20 à 30 personnes, les corporate resellers assurent qu'ils migrent vers les services. Mais ce n'est qu'un tout petit pas, qui n'est sûrement pas à la hauteur de leur ambition. D. Même s'il reste encore beaucoup de services « gratuits », la distribution a compris qu'elle devait faire payer aux clients ses prestations. Pourtant certains services, tels l'audit, le conseil en réduction des coûts et la formation, continuent de ne pas être facturés. Pourquoi ? N.J. Rien n'est systématiquement non facturé. Reste que, pour pouvoir facturer, encore faut-il savoir conférer de la valeur au service que l'on délivre. Prenons l'exemple de la formation. Si l'on se contente de dispenser deux ou trois consignes de base aux utilisateurs, pourquoi le client accepterait-il de payer ce service ? En revanche, si le revendeur présente un déroulé de son programme de formation, dispose de différents supports à remettre aux utilisateurs... Bref, s'il donne vraiment du contenu à son service, le client appréciera cette « valeur » et sera prêt à la rémunérer. Les revendeurs ont un autre grand problème à résoudre, celui de leur force commerciale. Pour bien cerner les besoins en matière de services des clients, il faut mieux comprendre leur métier. Cette mutation est certes difficile à opérer, mais elle est indispensable pour qui veut renforcer son activité services. D. Quels sont les freins au développement des services ? Selon votre étude, 83 % des revendeurs ne disposent pas d'une base de données clients assez renseignée pour conduire des enquêtes ciblées... N.J. Les revendeurs reconnaissent que les freins internes existent et qu'il est difficile de les faire sauter sans un minimum d'investissement. Nous en avons identifié quatre, qui recouvrent le marketing, la force commerciale, l'organisation et les ressources financières. 83 % des revendeurs interrogés ont en effet indiqué que leur base de données clients n'était pas assez renseignée pour réaliser une enquête ciblée. Pourtant, les outils existent aujourd'hui. Il n'est que de voir les opérateurs, qui savent développer avec une science consommée et avec force de nouveaux services à l'intention de leurs clients. Par ailleurs, si 75 % des sondés estiment que leurs commerciaux ne sont pas formés ou capables de vendre du service, ils sont tout de même 33 % à admettre que leur système de rémunération n'est guère motivant pour les y inciter. De plus, 42 % considèrent que les processus internes ne leur donnent pas les moyens de fournir un service complexe et satisfaisant. Enfin, 54 % ne disposent pas d'un système de gestion leur permettant de suivre finement les coûts, le CA, les marges générées par l'activité services. Autant d'éléments qui me laissent penser que la culture du pilotage est assez faible. C'est d'autant plus dommageable pour la partie rémunération du service... Si je ne suis pas en mesure de déterminer ma marge sur les services, à combien vais-je fixer le prix d'une journée d'intervention chez un client ? D. Quel est le rôle des fournisseurs ? De quelle façon peuvent-ils aider le réseau de distribution à évoluer vers plus de services ? Et jusqu'où sont-ils prêts à aller ? N.J. Les fournisseurs peuvent clamer que la distribution va mal, ils n'en sont pas moins obligés de miser sur elle pour toucher les PME. Un intérêt commun, qui devrait pousser tout le monde à oeuvrer dans le même sens. Pour autant, il ne s'agit pas d'utiliser la méthode du rouleau compresseur en plaçant un ingénieur commercial (IC) indirect derrière chaque revendeur. Les fournisseurs devraient plutôt s'attacher à bien connaître leur réseau de distribution pour pouvoir identifier ceux des membres qui ont le potentiel et leur apporter les moyens pour avancer. Il reste en ce domaine un travail considérable à accomplir, puisque seulement 10 % des sondés se déclarent très satisfaits du support fournisseurs. Certes, la distribution attend un soutien classique, qui se traduit par des budgets de comarketing, des remises ponctuelles... Mais, à mon sens, le problème est ailleurs. Le support des fournisseurs devrait aussi intégrer une dimension management qui permettrait aux partenaires de mieux piloter leurs décisions. D. Les programmes de certification, qui se sont généralisés côté fournisseurs, sont-ils considérés comme des outils d'aide à la vente pour les revendeurs qui ciblent les PME ? En d'autres termes, sont-ils assimilés à des avantages concurrentiels ? N.J. En effet. Beaucoup d'appels d'offres publics et privés imposent de posséder les certifications fournisseurs requises. Pour autant, la grande majorité des PME n'est pas sensibilisée à cette problématique. La certification n'apporte donc pas un surcroît de crédibilité. Il convient d'ailleurs d'ajouter un second bémol : qu'est-ce qui se cache derrière la notion de certification ? Ainsi, 40 % des revendeurs indiquent avoir du mal à apprécier leur ROI. En outre, les certifications sont conçues essentiellement par les fournisseurs et poursuivent un objectif de sélection du réseau. On peut se demander s'il ne serait pas plus pertinent de partir du revendeur, en qualité de client, pour établir un programme de labellisation... Propos recueillis par Fabrice Dalongeville

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