« Les grands grossistes doivent apprendre à gérer un chiffre d'affaires en baisse »

Christian Bittebierre, Directeur Général d'Ingram Micro France

Distributique : Pouvez-vous confirmer que l'année 2008 a été marquée par une baisse du chiffre d'affaires pour Ingram Micro France ? Christian Bittebierre : La croissance en volume n'a effectivement pas été suffisante pour compenser une baisse des prix proche de 20% en moyenne. Le troisième trimestre a été particulièrement médiocre. Il était évident que nous devions répercuter l'augmentation de nos coûts de transports, notamment à cause de la hausse du prix du carburant. Nous l'avons fait en juillet et le résultat a été catastrophique sur les ventes au cours des mois qui ont suivi. Distributique : Les grands grossistes généralistes peuvent-ils encore être rentables ? Christian Bittebierre : Ingram Micro France a été rentable en 2008, comme en 2007, et nous pensons le rester en 2009. Les grands grossistes IT vont devoir apprendre à gérer la décroissance de leur chiffre d'affaires. D'ores et déjà, 70 personnes ont quitté l'entreprise sur un effectif qui comptait jusqu'à présent plus de 500 personnes. Les sacrifices ont concerné tous les services, depuis la logistique et le stock en passant par les achats. Distributique : Quelle visibilité avez-vous sur votre activité en 2009 ? Christian Bittebierre : Il serait présomptueux de parler de « visibilité ». Ce qui est certain, c'est que les grossistes généralistes ne pourront pas afficher des croissances de leurs chiffres d'affaires. La croissance en volume sera probablement au rendez-vous, mais à quel prix ? Aujourd'hui, la distribution de produits comme les imprimantes d'entrée de gamme est déficitaire. Et lorsque les constructeurs lancent des promotions du type « 2 imprimantes pour 1 achetée », il n'est même plus possible de couvrir les frais de port. Dans ce contexte, les filiales d'Ingram Micro ne font plus des prévisions à 1 an, mais à 6 mois. Distributique : Quelles sont les familles de produits qui représente selon vous les potentiels les plus importants ? Christian Bittebierre : Paradoxalement, il apparaît que les composants et les périphériques enregistrent de fortes progressions. L'explication la plus plausible n'est qu'à moitié rassurante : ces achats auraient d'abord pour but de retarder le renouvellement des matériels, ce qui suppose l'achat de mémoires supplémentaires, de webcams, etc. Ce phénomène ne concerne pas seulement les micro-ordinateurs, mais également la bureautique : il devient difficile de renouveler les parcs de copieurs. Distributique : Les grossistes ne peuvent-ils pas jouer un rôle pour débloquer les encours et faciliter l'achat et la revente ? Christian Bittebierre : Un grand nombre des baisses d'encours observées depuis l'automne nous semble irrationnelles et relève plus de la condamnation « à priori » d'un secteur d'activité que de l'examen individuel des entreprises. Seule une méfiance généralisée peut expliquer qu'on pénalise des prestataires à forte valeur ajoutée ou des « webmarchands » en pleine croissance. Nous avons déjà pris de mesures et des risques supplémentaires, mais il faut que tous les grands grossistes s'accordent sur ce sujet : personne, nous y compris, n'a envie d'être le seul à se prendre « des gamelles ». Distributique : Concernant vos marges de manoeuvre, quelles économies pourriez-vous encore réaliser ? Christian Bittebierre : Les processus logistiques sont continuellement en évolution. Dans ce domaine, chaque détail est examiné, en partenariat avec nos clients, du petit revendeur de proximité au grand site de e-commerce. Par exemple, pourquoi ne pas attendre une journée de plus pour que le camion soit plein si le gain est substantiel pour les deux parties ? Pourquoi ne pas livrer les commandes importantes directement depuis notre entrepôt européen plutôt que d'avoir des livraisons intermédiaires ? On peut illustrer le propos autrement : livrer une palette de consommables d'impression peut être rentable ; livrer des commandes à l'unité peut détruire la valeur du travail. L'essentiel des efforts doit aujourd'hui concerner la maîtrise des coûts. Le niveau de marge est tellement faible qu'une baisse du chiffre d'affaires ne met pas en cause le modèle économique. Distributique : De nouveaux réseaux de distribution de matériels informatiques montent en puissance, à l'instar des réseaux des opérateurs de téléphonie mobile. Vont-ils vous échapper ? Christian Bittebierre : Je suis confiant à ce sujet et nous commençons à travailler les opérateurs. Notre principale préoccupation est que le changement de modèle ne soit pas trop brutal : aucun grossiste informatique ne souhaite qu'on propose « un ordinateur gratuit pour un abonnement téléphonique ».

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