Dell : conte de fée et conte défait

La vente directe « à la Dell » n'est pas une invention récente : Dell a été créé en 1984, un an avant que l'IBM PC soit importé en France. Depuis, Dell a souvent servi d'épouvantail : c'était le « méchant » qui voulait éviter de passer par la distribution. Aujourd'hui, la frontière entre la « vente directe » et la « vente indirecte » s'est déplacée, quand elle n'a pas tout simplement disparu...

Dossier réalisé en collaboration avec
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Ce 23 février 2011, Michael Dell fêtait son 46ème anniversaire et savait déjà que le classement Forbes des plus grandes fortunes mondiales - qui allait être publié début mars - lui attribuait la 44ème position, avec une fortune personnelle estimée à 14,6 milliards de dollars. C'est une belle performance, même s'il se classe loin derrière ses aînés Bill Gates de Microsoft et Larry Ellison d'Oracle.

Voilà pour l'anecdote, mais l'important n'est pas là : on retient surtout qu'il a bâti cette belle fortune en se faisant passer pour le champion de la « vente directe », mais était-ce bien le message originel ? Non. Lorsqu'il a créé son entreprise Dell Computers à 19 ans, en 1984, il ne parlait pas de « vente directe » mais de « fabrication à la demande ». Ce n'était pas les revendeurs qu'il voulait supprimer, mais les stocks, dont le coût pouvait représenter de 10% à 20% du « prix public », le fameux street price.

Méchant pendant 25 ans

Si l'on s'en tient aux dates, le modèle de vente qui a fait son succès n'est pas une dérive du marché des PC : il est né en 1984 alors que l'IBM PC n'était même pas encore commercialisé en France. Par contre, Dell a très bien tenu le rôle d'épouvantail que l'ensemble de l'industrie IT lui a écrit, celui du méchant constructeur qui ne vend qu'en direct et qui casse les prix. Et cela a duré près de 25 ans. Ou plus précisément jusqu'en mai 2007.
Michael Dell envoie alors aux 80 000 salariés de l'entreprise un message où il explique qu'il faut ajouter de nouveaux relais de croissance au modèle de la vente directe « pur et dur ». Et dès les mois suivants, on trouve la marque Dell dans les rayons de la grande distribution, que ce soit chez Wall-Mart ou chez Carrefour.

Le marché IT en conclut logiquement que Dell va devenir un constructeur « comme les autres », c'est-à-dire capable de faire à la fois de la vente directe et de la vente indirecte.
Est-ce Dell qui a changé en 2007 et effectué un virage à 180° ? Concrètement, il semble que c'est le marché dans son ensemble qui a changé plus que Dell seul.
Deux données suffisent pour le rappeler. D'une part, sur le marché professionnel, Dell constatait depuis le début des années 2000 que plusieurs centaines d'intégrateurs et sociétés de services IT proposaient du matériel Dell à leurs clients. D'autre part, sur le marché grand public, qui ne représentait qu'une quinzaine de pourcents de son chiffre d'affaires, Dell avait un besoin évident des grandes enseignes de la distribution pour construire sa notoriété.

Dans les faits, ce n'est donc pas Dell qui a franchi la frontière qui séparait la vente directe de la vente indirecte : c'est la frontière qui s'est déplacée, voire qui a disparu en de nombreux endroits. Quels sont les résultats de cette évolution après quatre ans ? C'est l'objet du second volet de ce dossier.

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