Soldes informatiques : vraie promotion ou simple coup marketing ?

(12/07/04) - Alors que les partisans des soldes en profitent pour mettre en avant leurs produits récents, les opposants n'y voient pas grand intérêt dans une industrie où les prix baissent constamment. Le débat est ouvert. Depuis le 7 janvier, les soldes sont ouverts. Et pas seulement dans les magasins de prêt-à- porter. Certains revendeurs informatiques ont en effet pris le parti de placarder la fameuse mention sur leurs pages web ou leur vitrine, à l'image de Surcouf, PC City, rueducommerce.com et autres surcouf.com. « Les soldes nous permettent de sortir du stock des produits de gamme en fin de vie », explique Patrick Jacquemin, le Pdg de rueducommerce.com, coutumier de ce type d'opérations depuis juillet 2000. « Non sans un travail préparatoire assez lourd », ajoute Sacha Tikhomiroff, directeur général de PC City France. À partir de la mi-décembre, pour les uns, ou après Noël, pour les autres, commence un inventaire des stocks résiduels à l'issue duquel les revendeurs doivent s'assurer que le réassortiment des produits qui porteront la mention « Soldes » a été interrompu par leurs fournisseurs (lire encadré). Le tout relayé par des campagnes de communication destinées aux clients. Une intense campagne de communication Chez surcouf.com, la période des soldes a ainsi été amorcée quelques jours avant son commencement par des popunder (fenêtres publicitaires s'affichant à l'arrière-plan d'un site visité et qui seront découvertes à la fermeture du site). L'opération est assortie d'une campagne d'e-mailing avant et pendant les soldes. « Nous avons édité une brochure de huit pages distribuée dans les zones de chalandise de chacun de nos six superstores », relate Sacha Tikhomiroff. Comme Surcouf, PC City a également lancé une campagne de publicité spécifique sur les ondes de plusieurs radios (RTL 2, Europe 2, OuiFM, Sky Rock). Autant d'investissements justifiés par l'augmentation de la fréquentation et des recettes des enseignes qui se lancent dans ces braderies. Chez surcouf.com, le trafic serait ainsi plus important que celui enregistré lors de la période de Noël, pourtant déjà très intense. « Il ne s'agit pas de jours records en terme de chiffre d'affaires car les paniers sont en général moins importants. Les internautes ne commandent le plus souvent qu'un seul article », pondère Pascal Griot, directeur du marketing et de la communication de Surcouf. Sans compter, comme le rappelle Patrick Jacquemin, que « cette période est logiquement synonyme de marges réduites, compte tenu des baisses de prix pratiquées ». Elle est en tout cas une très bonne occasion de créer en parallèle d'autres opérations promotionnelles qui renforcent l'ambiance de baisse des prix ou de mêler des produits non soldés à des publicités pour les soldes. Ainsi surcouf.com affiche-t-il dans son espace Soldes créé pour l'occasion des produits estampillés « Bonnes affaires », sans préciser s'il s'agit de prix réduits puisque la loi ne l'y oblige pas. Rueducommerce.com a, quant à lui, lancé une opération de paiement en trois fois sans frais à partir de 500 € d'achats. « Puisque le trafic augmente, autant faire ce qu'il faut pour stimuler les ventes », argue Patrick Jacquemin. Ces ventes, lorsqu'elles relèvent de produits soldés, concernent en premier lieu chez Surcouf des PC de bureau de coeur de gamme, suivis de lecteurs MP3 et d'appareils photo numériques. « Ce classement ne reflète pas forcement les ventes de l'année, indique Pascal Griot. Notamment sur le segment des ordinateurs, qui est désormais orienté ordinateurs portables. » Un des revendeurs interrogés affirme accorder des remises allant jusqu'à 50 %, voire 60 %. Peut-être. Mais en tout cas pas sur les ordinateurs, car il est difficile, calculatrice à la main, de trouver une remise supérieure à 10 %. Et pour cause : l'industrie de l'informatique ne génère pas de marges très confortables... « Il arrive fréquemment qu'elles n'atteignent que 15 à 16 % », précise Patrick Jacquemin. Le consommateur tranchera une fois encore « Les réductions que pratiquent certains de mes confrères sont mensongères. Les prix des produits soldés sont les mêmes que ceux qui seraient affichés sans cette période de promotion», affirme Laurent de la Clergerie, le président du site de vente en ligne ldlc.com. En outre, selon lui, certains de ses concurrents seraient en infraction avec la législation en vendant des produits qui continueront de leur être fournis par les grossistes à l'issue de la période des soldes. Pour toutes ces raisons, ce site marchand ayant pignon sur web a décidé de ne pas participer à cette grande braderie. Un exemple isolé ? Loin s'en faut. Aux abords de l'avenue Daumesnil, où se trouve Surcouf, rares sont les concurrents du vaisseau amiral qui ont décidé de plonger eux aussi dans les prix cassés. « Pour effectuer des soldes, encore eût-il fallu que nous ayons des stocks. Ici, nous fonctionnons en flux tendus », explique-t-on par exemple chez le revendeur Wintec. Même raisonnement dans le magasin Compucity de l'avenue Daumesnil, qui fait partie de l'enseigne Microconcept dont les quatorze magasins appartiennent au groupe Intercontinent. « En informatique, les soldes ne servent à rien car la fluctuation des prix empêche la gestion de ce type de période promotionnelle », explique David Thomasson, le directeur marketing de Compucity. Une affirmation contre laquelle le président-directeur général de rueducommerce.com s'inscrit en faux : « L'industrie informatique est l'une de celles pour qui les soldes sont les plus intéressants, estime Patrick Jacquemin. Au vu des évolutions technologiques et des changements de prix qui interviennent plusieurs fois dans l'année, nous devrions pouvoir pratiquer des soldes trois à quatre fois par an », ajoute-t-il même. Quoi qu'il en soit, le débat est désormais bel et bien ouvert. Cependant, comme souvent, c'est le consommateur, seul véritable arbitre, qui tranchera et décidera de la pérennité des soldes high-tech. Si tant est qu'on le sensibilise à ces opérations. Jeudi dernier, en milieu d'après-midi chez Surcouf, sur la quinzaine de personnes que nous avons interrogées, seul un habitué du lieu nous a déclaré s'être déplacé pour profiter des soldes. On est bien loin de la frénésie constatée dans les grands magasins...