« Il faut insuffler l'esprit entrepreneurial aux syndicats et associations professionnels »

Une interview de Bruno Vanryb, président du Comité éditeurs du Syntec Numérique et co-président d'Avanquest

Distributique : Vous voulez rassembler l'écosystème des éditeurs, au sein du Syntec Numérique, vous recrutez, mais dans quel but ?

Bruno Vanryb :
« Les éditeurs représentent 450 des 1 100 adhérents du Syntec Numérique. Une catégorie très bien représentée, mais qui reste en majorité concentrée sur le marché BtoB et professionnel. Or, le monde des éditeurs s'adresse à un marché beaucoup plus vaste que celui des entreprises, comme le monde  des portails online ou celui des jeux vidéo, pour prendre des exemples très différents. Nous voulons donc être représentatifs de l'ensemble du monde des éditeurs et créateurs de logiciels, indépendamment du secteur d'activité.

Deuxième aspect, les éditeurs de logiciels, qu'ils s'adressent aux entreprises ou au grand public, ont en commun les mêmes caractéristiques : ils font de la R&D, créent leurs propres produits, innovent et génèrent de nouveaux emplois. Nous voulons rassembler ces entreprises qui tout simplement exercent le même métier.

Distributique
:
D'autres associations se développent dans le monde des éditeurs, comme l'Afdel dans le BtoB, ou le SELL, votre démarche est-elle un appel à la fusion ?

Bruno Vanryb :
Il existe effectivement plusieurs associations. Mais un syndicat comme le Syntec Numérique et une association professionnelle ont des rôles différents. En tant que syndicat professionnel, nous sommes au coeur des négociations sur la formation professionnelle, la convention collective et les salaires. Le syndicat reste donc un lieu unique. Ce qui ne nous empêche pas d'exercer efficacement, comme les associations professionnelles, des fonctions de lobbying et d'animation de réseaux. 

Autre différence, notre syndicat veut représenter toute la profession, tous les métiers des éditeurs informatiques. Ce monde va de Microsoft aux développeurs sur l'App Store, c'est donc très large. Nous cherchons  à être le plus représentatif possible pour peser sur les décisions. Regardez, le Geicet, avec sa fusion dans le Syntec Numérique, ce dernier pèse dorénavant 370 000 salariés, 40 milliards d'euros de CA. Bref, des associations existent, mais pour faire une analogie politique osée je crois plus aux grands partis rassembleurs qu'aux groupuscules éclatés.

Distributique
:
Quand même, avec l'Afdel, qui agit sur les mêmes thèmes que votre comité, vous allez procéder comment ?

Bruno Vanryb :
Il ne faut pas être provocateur. L'Afdel est une association qui fonctionne bien et est dotée d'un excellent président et d'un délégué général efficace. A leur création, le Syntec Informatique ne représentait pas efficacement les éditeurs. Aujourd'hui, il faut aller vers plus de collaboration, et je souhaite travailler avec l'Afdel lorsque cela fait du sens, sur des sujets d'intérêt général pour notre profession comme par exemple le crédit impôt recherche.

Distributique
:
Votre comité éditeurs annonce le lancement d'un Baromètre trimestriel, en quoi est-il innovant ?

Bruno Vanryb :
Ce projet part d'une idée simple : notre métier est mal connu. Le mot « éditeur » est entré dans les têtes, mais la réalité est inconnue. Je pense que nous devons communiquer autrement. Nous allons créer un Baromètre trimestriel qui aura deux fonctions : positionner notre métier et montrer sa réalité en chiffres clés. Sur le 1er point, il s'agit d'effectuer un benchmark au plan européen pour montrer le poids des éditeurs français de logiciels. Sur le second aspect, nous montrerons notre capacité de croissance, d'innovation et de création d'emplois.

Avec ce Baromètre nous pourrons répondre à des questions plus qualitatives : par exemple montrer  où se situent nos adhérents, leurs compétences en matière par exemple de cloud, de smartphones, de Mac OS... Montrer que nos adhérents précèdent le marché et ne sont pas des suiveurs.

Distributique
:
Autre lancement, celui du
Syntec 250, il existe pourtant déjà des classements d'éditeurs, le Truffle 100 ou l'Eurosoftware?

Bruno Vanryb :
Il existe déjà des classements, mais je vais prendre un exemple, il y a une semaine, Avanquest a racheté Micro Application, n°1 des éditeurs français grand public avec 20 millions d'euros de chiffre d'affaires. Or, Micro Application n'est dans aucun de ces deux classements.  Comment expliquer une telle omission?  Tous ces classements utilisent finalement une même base, équivalente à celle du CXP qui est « remoulinée ».  Ils se limitent donc au secteur professionnel et n'intègrent pas assez les différents acteurs.

Nous voulons au contraire réaliser quatre ou cinq classements différents répondants aux catégories principales d'éditeurs. A chaque fois, on va répertorier 40 ou 50 sociétés qui seront comparées aux sociétés de la même catégorie. Un exemple, celui des sociétés de services qui font aussi du logiciel, alors que ce n'est pas leur métier principal. Pour éviter la confusion, il faut créer une catégorie spécifique et les comparer entre elles, comme pour les autres éditeurs. Bien entendu nous aurons aussi un classement général reprenant la synthèse de tous ces classements. C'est Ernst & Young qui réalisera cette opération en partenariat avec nous.

Distributique
:
Avec un peu de malice cette fois, vous lancez le Livre Noir et Blanc des éditeurs informatiques, il existe pourtant une multitude de rapports.

Bruno Vanryb :
En France, on a soit des gens qui râlent, soit des gens qui proposent. Moi, j'aime bien les deux. Donc pour changer du traditionnel Livre Blanc qu'on empile à la cave avec ses prédécesseurs, le Collège va créer un Livre Noir et Blanc,  avec d'un côté 10 points de blocage (c'est la partie Livre Noir)  et de l'autre dix propositions (c'est la partie Livre Blanc). C'est un très gros travail, je ne peux pas encore donner de date de sortie, mais l'idée est bien étayée et nous prendrons le contre pied des habituels Livres Blancs.

Le marché français du logiciel suivant les études varie entre 4 et 5 milliards d'euros de chiffre d'affaires en France, contre environ 300 dans le monde. La France étant le 5ème pays dans le monde par le PIB devrait afficher un meilleur score. Et ce n'est pas lié à la qualité de nos ingénieurs qui sont valorisés dès qu'ils partent à l'étranger. C'est donc une question de culture et de blocage. Nous émettrons dix propositions pour avancer tout en étant très réalistes au niveau économique.

Distributique
:
Prenons un exemple, celui de la e-education, 1 milliard d'euros est prévu pour elle dans le grand emprunt et le rapport Fourgous fait une large part au logiciel, êtes vous candidat pour en obtenir une partie ?

Bruno Vanryb :
Nous ne sommes pas dans la démarche de réclamer de l'argent. Nous voulons parler projets. Si sur cette somme 40 millions d'euros par exemple sont affectés à un projet précis avec le travail des éditeurs pourquoi pas. Mais la structure technocratique du grand emprunt me fait redouter le pire. Il y a beaucoup d'argent public distribué. Il faut réfléchir, savoir comment l'orienter, au bon endroit et de façon ponctuelle. Sinon, les fonds publics vont se concentrer sur les grands projets, qui sont plus du côté hardware que software, au détriment de l'économie de l'immatériel, celle des éditeurs.

Il faut bien comprendre que la filière éditeurs n'existe pas en tant que telle en France. Avec la nouvelle gouvernance du Syntec Numérique nous avons réuni la bonne équipe pour changer les choses. Il y a quelques années, j'ai pris la succession de Denis Payre comme président de Croissance Plus. Cette association s'est fait reconnaître des pouvoirs publics, a obtenu des résultats, en montant très haut auprès des décideurs politiques. C'est donc possible. Nous allons le faire au Syntec Numérique en proposant une autre vision,  celle des entrepreneurs. Il faut appliquer l'esprit entrepreneurial aux associations et syndicats professionnels. C'est ce qui fera la différence. »

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