Le prix des licences VMware pourrait grimper suite au rachat par Broadcom

Après EMC et Dell Technologies, VMware risque de passer sous le giron de Broadcom moyennant un chèque de 61 milliards de dollars. (Crédit Google)

Après EMC et Dell Technologies, VMware risque de passer sous le giron de Broadcom moyennant un chèque de 61 milliards de dollars. (Crédit Google)

Selon les analystes, l'acquisition de VMware par Broadcom pourrait donner lieu à plus d'initiatives en matière de 5G, de réseaux définis par logiciel et de gestion multicloud, mais aussi à des prix plus élevés.

L'acquisition de VMware par Broadcom pourrait déboucher sur des technologies innovantes qui intéresseront les entreprises et les opérateurs de télécommunications. La question est de savoir si Broadcom laissera VMware poursuivre le développement d'outils pour la 5G, les réseaux définis par logiciel (SDN) et d'autres technologies. Jeudi, le fournisseur de semi-conducteurs a confirmé avoir conclu un accord pour racheter VMware dans le cadre d'une opération d'une valeur d'environ 61 milliards de dollars en actions et en cash, sous réserve des conditions de clôture, notamment l'approbation des autorités réglementaires et des actionnaires. L'accord de fusion comprend une clause de « go-shop » qui donne la possibilité à VMware d'examiner les propositions alternatives d'autres parties jusqu'au 5 juillet. Mais en cas de maintien et d'approbation, l'acquisition devrait être conclue d'ici la fin janvier 2023. L'unité commerciale créée par Broadcom Software Group (avec CA Technologies et Symantec) et VMware exercera son activité sous la marque VMware. Selon les experts, « le groupe ainsi constitué aura la capacité de développer des technologies d'entreprise et de télécommunication qui pourraient intéresser davantage d'utilisateurs des deux secteurs ».

VMware SaaS

Cette année, VMware s'était fixé comme priorité de proposer ses principaux produits sous forme d'abonnement ou d'offres SaaS. « Plus précisément, toutes nos offres de datacenters définis par logiciel seront disponibles sous forme de logiciels dans le cloud, comme c'est déjà le cas de nos offres SaaS Tanzu de gestion du cloud, de sécurité et axées sur l'utilisateur final, ce qui contribuera à accélérer la transformation de notre modèle d'entreprise », avait déclaré Raghu Raghuram, CEO de VMware, lors de la conférence téléphonique de février organisée avec les analystes financiers. Pour le premier trimestre fiscal de l'année, qui s'est terminé le 1er mai, le fournisseur a obtenu de bons résultats, ses revenus d'abonnement et de SaaS ayant atteint 899 millions de dollars, en augmentation de 21 % par rapport à l'année précédente. Pour ce trimestre, le chiffre d'affaires des services SaaS et des abonnements comptait pour 29 % du chiffre d'affaires total, lequel a augmenté de 3 % en glissement annuel pour atteindre 3,09 milliards de dollars. Le coeur de métier de VMware se situe dans le logiciel, et les analystes pensent qu'il faudra scruter de près la manière dont l'entreprise progresse avec la virtualisation des postes de travail et serveurs, la virtualisation des fonctions réseau (NFV), le logiciel de mise en réseau NSX et d'autres technologies logicielles. « VMware a toujours entrepris de lentes et régulières incursions dans des domaines divers de la technologie et de l'innovation réseau - SD-WAN, infrastructure NFV dans les secteurs des télécommunications et des entreprises, et je pense que cela va continuer », a déclaré Rohit Mehra, vice-président du groupe Network and Telecom Infrastructure d'IDC. « Par exemple, à l'origine, NSX était un pur overlay de réseau que VMware a fait évoluer en plateforme réseau, multicloud et de sécurité pour les opérations cloud, de conteneurs et de datacenters », a encore déclaré M. Mehra.

Développement dans les telcos


L'entreprise s'est également engagée plus avant dans les technologies de télécommunication, comme le support de la 5G. L'an dernier, VMware a lancé la plateforme radio-access network (RAN) Telco Cloud Platform pour permettre aux fournisseurs de services de virtualiser leurs opérations RAN. Raghu Raghuram, le CEO de VMware, a déclaré que le soutien de l'infrastructure 5G jusqu'à l'edge par le fournisseur avait donné naissance à un environnement hybride dans lequel l'infrastructure du datacenter disposait des mêmes caractéristiques que celles du cloud, et qu'à l'avenir cette capacité jouerait un rôle commercial essentiel, une orientation que Broadcom devrait être en mesure de poursuivre avec ses propres puces dans divers équipements de télécommunications. « L'ambition de VMware est d'installer sa pile de virtualisation à la périphérie de la 5G », a déclaré Keith Townsend, directeur de The CTO Advisor. « Broadcom est mieux positionné dans l'espace des télécoms et pourrait ouvrir des portes à VMware », a-t-il ajouté.

Des opportunités dans les smartNICs


Autre domaine qui pourrait donner lieu à une synergie entre VMware et Broadcom : le développement d'environnements smartNIC pour décharger les tâches CPU du serveur sur un dispositif distinct afin de libérer des cycles de CPU, prendre en charge des services cloud, de traitement, de mise en réseau, de stockage et de sécurité définis par logiciel et accélérer le déploiement des réseaux edge, de colocation ou de fournisseurs de services. VMware a déjà commencé à développer son environnement Project Monterey, lequel regroupe des serveurs bare-metal, des processeurs graphiques (GPU), des réseaux d'interconnexion programmables (FPGA), des cartes d'interface réseau (NIC) et la sécurité dans un environnement virtualisé à grande échelle. L'un des composants clefs n'est autre que la carte réseau SmartNIC de VMware, qui intègre un CPU polyvalent, une gestion hors bande et des fonctions de dispositif virtualisé. Dans le cadre du projet Monterey, l'éditeur a ouvert son hyperviseur ESXi pour qu'il fonctionne sur la NIC, ce qui permet de fournir un framework de gestion unique pour toute l'infrastructure IT, qu'elle soit virtualisée ou bare-metal. Un accord entre VMware et le géant des GPU Nvidia - Intel est également partenaire - prévoit de porter l'unité de traitement des données DPU (Data-processing Unit) BlueField-2 et d'autres technologies sur Monterey. Certains de ces projets pourraient venir en soutien des efforts d'ingénierie engagés par Broadcom. Ce dernier a également sa carte smartNIC, et plus exactement son adaptateur Stingray qui vise les applications réseau, de stockage et de sécurité.

Des options d'intégrations multiples


« Un rapprochement de l'ingénierie entre le portefeuille existant de Broadcom et celui de VMware pourrait déboucher sur de meilleures intégrations entre les produits », a déclaré Andrew Lerner, vice-président de la recherche de Gartner.  « C'est le cas par exemple entre VMware Project Monterey et l'activité semi-conducteurs de Broadcom, et entre ValuOps de Broadcom et VMware Tanzu », a-t-il déclaré. « Des synergies sont également possibles entre la gamme de produits de gestion du cloud Vrealize de VMware, et notamment Vrealize Automation et Vrealize Operations, et la pile logicielle de Broadcom qui repose sur la technologie acquise lors du rachat de CA », a aussi déclaré Naveen Chhabra, analyste chez Forrester. « La fusion pourrait également donner lieu à une certaine rationalisation, un affinage, pourrait-on dire, des produits », a encore déclaré M. Chhabra. Mais ce dernier ne pense pas que le co-développement se fera sans heurts, d'autant que Monterey, en particulier, fait intervenir d'autres fabricants de puces. « Les entreprises auront sûrement certaines synergies dans les logiciels, mais on ne sait pas du tout comment fonctionneront les partenariats que les deux fournisseurs ont conclu avec d'autres grands acteurs industriels et opérateurs de services », a déclaré Rohit Mehra d'IDC. Selon les analystes, le projet de rachat soulève d'autres questions. Par exemple, une possible augmentation des tarifs pour les clients. Certains se demandent aussi si l'innovation de VMware prospérera sous la propriété de Broadcom. « Les finances de VMware sont solides, le fournisseur possède une base installée importante et fidèle, et son portefeuille de produits est diversifié », a déclaré Andrew Lerner de Gartner. « VMware dispose d'une énorme base installée (500 000+) de clients d'entreprise qui utilisent ses produits dans leurs datacenters. Et l'on peut dire qu'ils sont profondément ancrés dans les habitudes des clients. Mais, compte tenu des antécédents de Broadcom, les clients de VMware risquent de ne pas continuer comme si de rien n'était », a ajouté M. Lerner.

Des augmentations de prix à l'horizon ?


« Sur la base des déclarations de Broadcom et des précédents avec CA/Symantec, nous pensons que Broadcom augmentera les tarifs des licences de VMware et ajustera ses dépenses de R&D », a déclaré M. Lerner de Gartner, qui fait remarquer qu'en pourcentage des revenus, Broadcom dépense moins en R&D que VMware. « Broadcom a déclaré publiquement qu'elle gérait les entreprises de logiciels qu'elle a acquises différemment de ce qu'elles faisaient auparavant, l'objectif étant que ses rendements financiers soient conformes à son propre modèle commercial « rigoureux » », a-t-il ajouté. « Les clients ont déjà le sentiment que VMware est cher », a déclaré Naveen Chhabra, de Forrester. « Les clients parlent déjà beaucoup de 'V-tax' ou taxe VMware. Compte tenu des annonces récentes, ils pourraient s'inquiéter des augmentations de prix, comme ce fût le cas lors des acquisitions précédentes de Broadcom. Les augmentations de prix pourraient rebuter certaines entreprises. Un certain nombre d'entre elles réclament déjà des alternatives », a fait remarquer M. Chhabra.

Préoccupations en matière d'innovation

L'approche de Broadcom en matière de R&D soulève également des inquiétudes quant à l'innovation. « Les intentions de Broadcom, du moins dans le passé, ne montrent pas que l'innovation a été sa priorité. Nous verrons donc ce qui se passera cette fois », a encore déclaré M. Chhabra. Point positif, par contre : le fait que les opérations logicielles existantes de Broadcom seront intégrées à VMware, qui conservera son nom, laisse penser que Broadcom a changé d'attitude par rapport à sa gestion antérieure des acquisitions et qu'il y a une marge de manoeuvre pour réaliser l'intégration des développements de produits qui se chevauchent. « La décision de Broadcom de rebaptiser son entité logiciels sous le nom de VMware montre que son approche a évolué par rapport aux acquisitions logicielles antérieures », a déclaré Andrew Lerner de Gartner.

Une prudence de mise pour les utilisateurs


Mais, comme pour toute grande fusion entre grandes entreprises technologiques, la réalisation de synergies entre des lignes de produits multiples et variées est incroyablement complexe, et les utilisateurs sont invités à faire preuve de prudence. « Les utilisateurs ne doivent pas s'imaginer que les choses vont continuer comme avant à long terme », a encore déclaré M. Lerner. « Ils doivent valider l'inventaire existant pour se préparer aux changements de licence et/ou explorer les alternatives des fournisseurs ». Celui-ci leur conseille également « de faire pression sur VMware pour obtenir des engagements écrits sur la feuille de route, le plafonnement des prix et des clauses de sortie pour les accords de licence pluriannuels ».



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