Président et fondateur de 9LivesData, Cezary Dubnicki a longtemps travaillé chez NEC Labs America (NECLA) autour du projet Hydrastor. (Crédit P.K.)
High9Stor, la plateforme de sauvegarde scale-out de 9LivesData, entend capitaliser sur seize ans d'expertise acquise avec NEC Hydrastor pour proposer une alternative logicielle, dense et optimisée en coût total de possession sur le marché du back-up, face à des acteurs comme Dell Data Domain, ExaGrid, Cohesity ou Rubrik.
Créé comme spin-off de NEC Labs America (NECLA) autour du projet Hydrastor, 9LivesData a été fondé en avril 2008 par Cezary Dubnicki (aujourd'hui président et fondateur et ex-responsable du département stockage de NECLA), qui revendique « 25 ans d'expérience dans le stockage secondaire et le backup ». La société a conçu l'architecture et les principaux algorithmes de Hydrastor, implémenté environ 70% du code du produit, déposé 24 brevets et publié une douzaine d'articles de recherche sur le sujet, avec des déploiements cumulant des milliers de noeuds et des exaoctets de données sans perte sur seize ans. Le nom 9LivesData renvoie explicitement à l'image du chat aux neuf vies, « qui survit à des chutes dont il ne devrait pas réchapper », métaphore assumée de la résilience recherchée pour les données de sauvegarde. Ceszary Dubnicki joue aussi sur le double sens de « high nine », utilisé dans les télécoms et le stockage pour désigner des niveaux de disponibilité de type neuf neuf (99,9999999%), pour insister sur la robustesse de la plateforme.
De NEC Hydrastor à High9Stor
9LivesData est né pour industrialiser NEC Hydrastor, présenté par le dirigeant comme « l'un des premiers systèmes de sauvegarde scale-out avec déduplication globale » et longtemps « le plus rapide et le plus scalable », capable de s'étendre jusqu'à 165 noeuds 2U et 27 Po bruts dans une seule grille. Cette expérience a fourni au spin-off un socle technologique et opérationnel important, y compris une capacité de support de troisième et quatrième niveau pour des banques et grands comptes, illustrée par des cas de récupération de données après des incidents de salle blanche sans perte de sauvegardes. Lorsque NEC a recentré la commercialisation d'Hydrastor sur le Japon, 9LivesData a pris l'initiative de porter la technologie vers une nouvelle génération baptisé High9Stor, software-defined et orientée TCO, afin d'offrir une continuité de trajectoire aux clients historiques hors Japon. « Il est dans le meilleur intérêt de NEC que nous rendions ce produit disponible, parce que nous pouvons prendre soin des clients existants en dehors du Japon, et ils sont vraiment en support », nous expliqué Cezary Dubnicki à propos de l'accord trouvé avec NEC, lors d'un récent IT Press Tour.
La plate‑forme High9Stor de 9LivesData est pensée comme une cible de stockage de type appliance/NAS pour environnements VMware, Hyper‑V, Nutanix... pour des logiciels de sauvegarde qui, eux, gèrent les copies locales et/ou cloud. Dans les déploiements typiques, High9Stor sert de repository principal local où les jobs de sauvegarde écrivent leurs données, tandis que le logiciel de back-up peut ensuite répliquer ces sauvegardes vers du cloud (S3, Wasabi, etc.) ou un autre site. Autrement dit, le support du backup cloud dépend du moteur de sauvegarde utilisé (Nakivo, Veeam, etc.), pas de High9Stor lui‑même, qui se comporte comme une cible de stockage compatible fichiers/NFS/SMB ou iSCSI.
High9Stor : architecture et caractéristiques techniques
Plateforme de sauvegarde scale-out, High9Stor supporte des noeuds SuperMicro 1U embarquant 12 disques durs de 20 To, soit 240 To bruts par serveur, avec une montée en charge jusqu'à 180 noeuds et 43 Po bruts dans un seul cluster. L'éditeur annonce par ailleurs une compatibilité ascendante avec les grilles NEC Hydrastor existantes, ses noeuds pouvant cohabiter et participer à ces environnements. Le moteur de stockage met en oeuvre une déduplication globale sur blocs de taille variable, combinée à la compression, de manière à mutualiser la réduction de données entre toutes les applications de sauvegarde alimentant la plateforme (CIFS, NFS, S3, agent file-system, OST, intégrations Veeam, Commvault, Nakivo...). L'ensemble repose sur une architecture scale-out sans point unique de défaillance, où chaque noeud joue le rôle de contrôleur sur sa propre capacité, ce qui permet de paralléliser les tâches de fond (recyclage d'espace, rééquilibrage, vérifications) et de maintenir des temps d'exécution quasi constants à mesure que le cluster grossit.

L'ajout et le retrait de noeuds sont gérés par High9Stor. (Crédit P.L.)
Résilience, performances et global dedup
Pour la durabilité, High9Stor utilise des codes d'effacement au niveau de groupes de 12 disques durs, capables de tolérer jusqu'à six défaillances de lecteurs selon la configuration choisie par volume, tout en limitant la surcapacité dédiée à la résilience par rapport à une réplication 4 voies. La plateforme est conçue pour fonctionner avec des taux de remplissage proches de 95% sans dégradation significative, ce qui contribue directement à la réduction du coût au téraoctet utile.
Côté performances, le constructeur met en avant des capacités d'ingestion pouvant atteindre 72 To/h par noeud avec déduplication côté client, l'utilisation de tous les disques durs du système lors des restaurations et des temps de recyclage d'espace réduits de plusieurs semaines à quelques heures par rapport à certains concurrents scale-up ne disposant que d'un contrôleur central. « Nous avons vu chez un gros distributeur que le passage de l'ancien système à notre architecture multi-contrôleurs divise par 67 le temps nécessaire pour récupérer l'espace après suppression de sauvegardes », souligne M. Dubnicki.
Positionnement face à Data Domain, ExaGrid, Rubrik...
Dans sa présentation, 9LivesData positionne explicitement High9Stor face aux références du marché que sont Dell Data Domain, ExaGrid, HPE StoreOnce, Cohesity et Rubrik. L'éditeur insiste sur le double différenciateur « densité + déduplication globale scale-out », là où certains concurrents restent limités en capacité par cluster ou nécessitent des zones d'atterrissage non dédupliquées, comme ExaGrid avec son « landing zone », qui consomme une partie significative de la capacité brute. Un tableau de comparaison interne met en avant une densité de 240 To bruts par U pour High9Stor, contre 144 To/U pour Cohesity et 91 To/U pour Rubrik dans des configurations 2U, tout en restant sur des HDD 20 To comparables. L'autre argument clef porte sur la nature 100% logicielle de la solution, quand Data Domain reste essentiellement appliance scale-up et que la plupart des concurrents poussent leurs propres appliances même lorsqu'ils disposent aussi d'une offre software-defined. « Nous sommes les seuls dans ce panel à être purement software-defined, ce qui nous permet de suivre plus vite le marché côté CPU, HDD ou SSD et de laisser le client acheter son matériel au meilleur prix », insiste le fondateur.
Continuité et stratégie post-NEC
Sur le plan industriel, 9LivesData revendique déjà des revenus sur High9Stor via des projets de migration d'installations NEC Hydrastor existantes, notamment dans le secteur bancaire EMEA via le distributeur Data Sciences Corporation en Afrique du Sud. Chez un grand établissement financier, un plan de remplacement progressif des anciens noeuds Hydrastor par des noeuds High9Stor plus denses est en cours, parallèlement au déploiement de nouvelles grilles entièrement basées sur High9Stor.
Interrogé sur la santé de l'éditeur après la séparation avec NEC, M. Dubnicki met en avant ce pipe de migrations et de nouveaux projets pour asseoir le modèle économique de la société : « Le marché existe déjà, avec des centaines voire des milliers de noeuds Hydrastor qui devront être retirés ou remplacés ; notre objectif est d'offrir une trajectoire sans rupture à ces clients tout en réduisant leur TCO de 20% aujourd'hui, 30% bientôt ». L'entreprise, basée en Pologne, fonctionne avec un réseau d'intégrateurs et d'agents commerciaux, et revendique une capacité à assurer en direct les lignes de support avancé tout en s'appuyant sur des partenaires locaux pour le break-fix et l'installation.
Licensing, matériel et file system
High9Stor est livré en mode logiciel, avec aujourd'hui un support officiel de serveurs SuperMicro 1U, mais 9LivesData indique « travailler avec d'autres fournisseurs » et cite en aparté Quanta comme candidat pour enrichir la liste de matériel certifié list à court terme. Chaque noeud embarque le système de fichiers maison, spécifiquement optimisé pour les flux séquentiels de backup, et non XFS ou un autre file system Linux générique, afin de mieux contrôler la gestion des blocs, la déduplication et les tâches de fond.
Commercialement, l'éditeur met en avant un prix de 2 dollars hors taxes par téraoctet de capacité brute avec une licence perpétuelle, la plateforme démarrant à quatre noeuds pour offrir une résilience complète au niveau cluster. Cette grille vise à se positionner environ 20% moins cher que les solutions concurrentes sur des engagements pluriannuels, tout en laissant au client la liberté d'optimiser son ratio de codes d'effacement (plus ou moins de capacité nette vs résilience).
Focus Europe-Afrique, sans viser les États-Unis
Côté géographie, 9LivesData concentre pour l'instant ses efforts sur l'Europe au sens large (Union européenne, Turquie, Norvège, Suisse), le Moyen-Orient, l'Afrique et l'Asie centrale, en s'appuyant notamment sur le relais de partenaires déjà aguerris à Hydrastor. La société met aussi en avant un argument de souveraineté numérique, en soulignant que High9Stor est développé en Europe, dans un contexte où la Commission européenne pousse à diversifier les dépendances vis-à-vis des fournisseurs extra-européens.
Le marché américain n'est pas une priorité à court terme, en raison du coût d'entrée marketing et commercial jugé trop élevé pour une structure encore de taille modeste. « Pour aller aux États-Unis, il faudrait investir des millions en marketing ; pour l'instant, il est plus important de consacrer ces moyens au développement technique et à la migration de nos premiers clients », explique Cezary Dubnicki, qui n'exclut pas à terme des accords OEM avec des acteurs déjà implantés sur ce marché.







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