La moitié de l'économie numérique française repose sur les télécoms

Pierre Louette, président de la FFT (au centre), et les deux représentants des cabinets ayant réalisés les études sur l’écosystème du numérique : Ignacio Garcia Alves (à droite) pour Arthur D. Little et Didier Pouillot (à gauche) pour Idate Digiworld (Crédit : N.C.).

Pierre Louette, président de la FFT (au centre), et les deux représentants des cabinets ayant réalisés les études sur l’écosystème du numérique : Ignacio Garcia Alves (à droite) pour Arthur D. Little et Didier Pouillot (à gauche) pour Idate Digiworld (Crédit : N.C.).

En 2016, les acteurs du numérique français ont réalisé 75 milliards d'euros de chiffre d'affaires, dont 53% provenaient des opérateurs télécoms. Mais les revenus de ces derniers stagnent depuis quatre ans.

Depuis 2007, selon l'étude sur l'économie des télécoms réalisée par le cabinet de conseil Arthur D. Little pour la Fédération française des Télécoms (FFT), l'écosystème numérique mondial croît à un rythme plus soutenu que le PIB global. En dix ans, les revenus des acteurs du numérique ont grimpé en moyenne de 5% par an quand l'indicateur de richesses international indiquait une croissance annuelle moyenne d'un point inférieure. Le secteur a été porté par trois acteurs principaux, qui ont levé à eux seuls 90% du chiffres d'affaires total : les opérateurs télécoms, les fabricants de terminaux et les acteurs Internet.

Sur cette même période, le chiffre d'affaires des opérateurs télécoms européens a connu la plus faible croissance, seulement 1% en moyenne par an. En 2016, l'Asie dominait le secteur avec un chiffre d'affaires à 493 milliards d'euros. Mais ce sont les acteurs d'Amérique du Sud et d'Océanie qui ont connu la plus belle progression : +8% en dix ans.

Les télécoms, moteurs de la croissance du secteur

Au sein de l'Hexagone, l'écosystème numérique est largement dominé par les cinq principaux opérateurs télécoms (Orange, SFR, Iliad, Bouygues et le MVNO Euro-Information Telecom). Ils ont en effet généré 53% des 75 milliards d'euros de chiffre d'affaires réalisés en 2016. Cependant, sur les quatre dernières années, les revenus de ces acteurs n'ont pas évolué. Ils employaient 76% des 166 000 salariés directs du secteur. Enfin, sur les 10 milliards investis en 2016, 87% venaient des opérateurs télécoms. La Fédération française des opérateurs, en la personne de Pierre Louette, son président, estime que les investissements pour l'année 2017 resteront stables.

 La consommation d'internet mobile a explosé en dix ans (Sources : Arcep, Credoc).

Parmi les dynamiques que la FFT relève dans son étude, le marché du mobile est en forte progression, notamment en matière d'équipements et de consommation de données. Au deuxième trimestre de cette année, 37 millions de cartes SIM actives 4G étaient en circulation contre 27 millions au même trimestre en 2016. Sur la même période la consommation de données sur mobile a doublée, atteignant 3,7 Go par mois.

8 Mb/s pour tous en 2020

Au niveau des installations fixes, la France connaît une croissance de 35 % du nombre d'abonnements au très haut débit (supérieur ou égale à 100 Mb/s). Et se positionne au deuxième rang européen dans la couverture fibre. Selon une étude complémentaire à celle d'Arthur D. Little, réalisée par le think tank Idate Digiworld, 26% des foyers français étaient couverts en FTTH fin 2016. Très loin derrière l'Espagne tout de même, dont le territoire est couvert à 98% par la fibre où les coûts d'installation sont faibles et les normes urbanistiques moins contrôlées qu'en France. Elle est facilitée par les moindres coûts d'installation, liés à la fois à l'habitat groupé, y compris souvent en milieu rural, et aux normes urbanistiques, qui permettent souvent le câblage par la façade, alors que tout cela est beaucoup plus contrôlé dans l'Hexagone. « En France, il faut deux ans en moyenne pour installer un pylône quand en Allemagne, la procédure prend six mois » indique Pierre Louette qui souhaiterait que le processus administration soit simplifié. En 2016, dix millions de prises FTTH étaient déployés dans le pays et la FFT a pour but d'atteindre les trois millions de prises fibre produites par an. « Orange et SFR ont pris des engagements opposables pour que tout le monde ait accès à un bon débit - supérieur à 8 Mb/s - en 2020 » annonce le président de la Fédération des télécoms.

 

 Taux de pénétration sur l'ensemble de la population de 12 ans et plus (Sources : Arcep, opérateurs, AT&T, Arthur D. Little).

Au niveau des tarifs des services télécoms, la France reste la plus attractive comparé à cinq autres pays occidentaux. En novembre 2017, l'abonnement fixe triple play (téléphone, internet, télévision) est à 18€ par mois en France, 78€ aux Etats-Unis et 39€ en Grande-Bretagne. Le prix du forfait mobile des opérateurs français (appels, SMS, MMS illimités et Internet à 5 Go au moins) ne dépasse pas les 10€ par mois en moyenne. La même offre outre-Atlantique dépasse les 50€.

La FFT pour la neutralité du Net... en substance

Interrogés sur la neutralité du Net, Pierre Louette et les deux représentants des cabinets ayant réalisés les études sur l'écosystème - Ignacio Garcia Alves pour Arthur D. Little et Didier Pouillot pour Idate Digiworld - ont confirmé leur position en faveur de l'égalité de traitement de tous les flux de données sur internet. Alors que la Federal communications commission (FCC) a mis fin à ce principe aux Etats-Unis, « nous ne pensons pas que la neutralité du Net soit menacée en Europe » assure Pierre Louette. Mais le directeur général délégué d'Orange souhaiterait, avec l'arrivée de la 5G notamment, que des couches de services de transport de données soient réservées à certains secteurs - la médecine ou l'automobile connecté - afin d'éviter les coupures. Pour Ignacio Garcias Alves, cette capacité d'isoler les capacités du réseau - grâce à la virtualisation - pour certaines branches permettra à une troisième génération Internet de voir le jour où l'on utilisera des applications « critiques » qui auront besoin d'un certain type de latence ou de débit. Sans pour autant mettre fin à la neutralité du Net, selon lui.

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